Première phase de démolition à l’Elsau

Si le programme de renouvellement urbain de l’Elsau a débuté en 2020, la déconstruction des douze étages d’une des tours de la rue Mathias Grünewald marque un tournant pour les habitants du quartier. Il faudra deux semaines à la pelle aux longs bras pour la croquer complètement.

De Matthias Grünewald, peintre de la Renaissance, on connaît le célèbre retable d’Issenheim, exposé au musée Unterlinden de Colmar. Un des panneaux y métaphorise la tentation de Saint-Antoine par des monstres lui apparaissant.
Mais c’est un vrai monstre qui s’est attaqué, ce 15 avril, au numéro 40 de la rue du même nom, une tour carrée de 12 étages et 63 logements, construite entre 1969 et 1972, comme l’ensemble de l’habitat collectif de l’Elsau : la pelle Liebherr qui, avec ses airs de dinosaure, n’a fait que quelques bouchées d’un appartement du 12e étage, avec son bras télescopique d’une portée de 39 mètres et ses mâchoires d’acier.

Quatre tours détruites

La déconstruction, menée par l’entreprise Lingenheld, durera deux semaines. Six seront nécessaires pour éliminer les gravats dont 98% seront recyclés ou valorisés. Trois tours identiques connaîtront le même sort d’ici 2028, le temps à chaque fois, pour Ophéa, le bailleur social propriétaire de 70 % du parc locatif social à l’Elsau, de reloger ses locataires. La déconstruction des immeubles jugés les moins habitables répond aussi à l’enjeu de mixité sociale, prévu dans le programme de renouvellement urbain qui court de 2020 à 2030. Le groupe scolaire, aujourd’hui excentré, sera ainsi lui-même démoli pour laisser la place à des logements privés.  Il sera en revanche reconstruit à la place des quatre tours, au centre du quartier. 

1100 logements réhabilités

"Démolir n’est pas un objectif en soi", mais cela "permettra d’accueillir de nouveaux équipements scolaires et sportifs", a souligné le président d’Ophéa, Salah Koussa, devant quelques invités réunis autour des premiers coups de dents. Outre ces démolitions-reconstructions, 1135 appartements seront réhabilités, tant sur le plan énergétique que du confort. D’un coût de 174 millions d’euros subventionnés par l’Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru) et les collectivités locales, le programme de renouvellement urbain prévoit également une requalification des espaces verts et de nature ainsi que le retour ou la création de services publics et commerciaux qui manquent au quartier.
Après une boulangerie, devraient bientôt ouvrir une supérette et une maison de santé. Un distributeur de billets sera également installé et une résidence séniors construite. "On ne va plus reconnaître l’Elsau, mais l’esprit du quartier sera toujours là", a déclaré, émue, Hüllyia Turan, adjointe au maire et élue du quartier. Postée au début de la rue Grünewald et de l’entrée de ce quartier enclavé, une cinquième tour sera préservée, mais entièrement rénovée et dotée de balcons. Un fanal pour l’Elsau.

Gilbert Reilhac
Photos Dorothée Parent pour Ophéa