Au Mamcs, des œuvres et leur notice de fabrication

La nouvelle exposition du musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg s’intéresse à la réalisation d’œuvres dites « à protocole », pour lesquelles les artistes ont délivré les clés de fabrication. 

Imaginez reproduire des pièces artistiques en suivant une notice comme on réalise du bricolage. C’est ce que donne à voir, mais aussi à expérimenter, l’exposition « Mode d’emploi, suivre les instructions de l’artiste », organisée au Musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg (Mamcs), à partir du 27 septembre. Cette exposition met un coup de projecteur sur ces œuvres dites « à protocole » pour lesquelles des instructions sont fournies par les artistes afin que leur réalisation puisse être effectuée par tous et pas uniquement par des professionnels.  
C’est la première fois en France qu’une exposition propose un focus sur ce concept artistique, apparu dans les années 1960 et dont la paternité est attribuée à l’artiste français Marcel Duchamp mais aussi au peintre hongrois László Moholy-Nagy. Présentée en partenariat avec plusieurs acteurs culturels, comme le Centre Pompidou, le Frac Lorraine, le festival Musica et le Ceaac, elle sera visible jusqu’au 1er juin.

Eco-conception

La cinquantaine d’œuvres présentées a été produite par les équipes techniques du musée « en faisant appel à l’éco-conception et au réemploi », précise Philippe Bettinelli, commissaire de l’exposition et conservateur au centre Pompidou. À l’image de la première pièce qui introduit le parcours, une installation murale composée d’un ensemble de pages de dédicaces choisies par trois membres de l’équipe, en compagnie de l’artiste Claire Morel. "Ces premières pages sont issues de romans de seconde main, collectés par l’association A livre ouvert", détaille Philippe Bettinelli. Un réemploi d’ouvrages qui "traduit aussi l’ancrage de l’exposition dans le cadre de Strasbourg Capitale mondiale du livre", glisse Anna Millers, conservatrice au Mamcs et commissaire de l’exposition.
Au fil des salles du musée, de grands noms de l’art contemporain cheminent sur les cartels, ces panneaux explicatifs accompagnant les œuvres. Mais avec toujours la même particularité : celles-ci n’ont pas été transportées d’une collection à l’autre pour l’exposition, mais bien reproduites sur place puis vouées à être détruites, voire auto-détruites. "Après l’exposition, souligne Philippe Bettinelli, il ne restera plus que les modes d’emploi."
Les élèves du lycée Louis-Pasteur à Strasbourg s’en sont d’ailleurs saisis début septembre, en reproduisant un prototype de nuage exposé au musée. Conforme au protocole de l’architecte Yona Friedman, il est réalisé à partir de matériaux recyclés. 
Émilie Girard, directrice des musées de Strasbourg, insiste sur "le caractère ludique et le potentiel très grand public de l’exposition, visible sur un temps long, ce qui la rend encore plus éco-responsable". Des visites commentées, des performances musicales, des conférences ou encore des ateliers sont ainsi prévus durant toute la période. 

Lucie Dupin
Photos Jérôme Dorkel